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Grand Orgue Saint Nicolas Neufchâteau

1684: orgue neuf de Jean Treuillot.

1840: relevage par Jean- Baptiste Gavot.

1861 : transformation par Charles Didier.

1884 : petite intervention de Jaquoî-Jeanpierre.

1892 : transformation par Henri Didier.

1900 : ajout d'un troisième cla­vier par Henri Didier. 1929: relevage par Joseph Voegtlé.

1964 : transformation par Curt Schwenkedel.

Grâce aux dispositions testa­mentaires de Simon Sallet, sei­gneur de Coussey et trésorier général de Lorraine et du Barrois, décédé en 1675, un orgue neuf put être construit en 1682, par Jean Treuillot (ou Trévillot), fac­teur établi à Langres mais origi­naire de Mirecourt. Un marché avait été signé le 9 juillet 1680, prévoyant un grand-orgue de 11 jeux et un Cornet d'écho. La réception eut lieu en octobre 1684, par African Verny, curé de Vézelise. Celui-ci ne fut certaine­ment pas mécontent de l'ouvrage, puisque la ville de Vézelise demanda en 1685 au même fac­teur d'augmenter son orgue et de le rendre en tout semblable à

 

celui de Saint-Nicolas de Neuf- château. Lors de la réception, le positif de dos n'était probable­ment pas encore posé, puisque Treuillot reçut 1 600 « livres mon­naie de France », somme prévue par le devis de 1680. Ce positif semble donc avoir été posé ulté­rieurement, mais aussi par Treuillot. Quant au buffet, il est l'œuvre de Christophe II Jacquin, maître sculpteur à Neufchâteau, qui reçut 1 000 « francs » pour son travail.

Jean Treuillot resta plusieurs années à Neufchâteau, comme organiste des deux paroisses (Saint-Christophe et Saint- Nicolas, pour 350 fr par an, selon le marché du 10 décembre 1683, renouvelé pour deux ans le 28 décembre 1684). Ne serait-ce pas plutôt l'un des fils de Jean Treuillot, également prénommé Jean, plus tard organiste à Mire- court, voire même sa fille Barbe Treuillot, qui fut ensuite organiste des Chanoinesses de Remire- mont, puisque l'un des documents parle du « traité fais avec la fille dud. Treuillot » ? En 1689, l'orga­niste de Saint-Nicolas, Joseph Dageville, apposa sa signature sur le marché pour l'agrandisse­ment de l'orgue de Saint-Chris­tophe, où l'orgue de Saint-Nico­las devait également servir de modèle.

A la Révolution, en 1792, l'orgue fut vendu comme bien national. Il fut acheté pour 150 livres par la famille de la Valette, dans le but de préserver l'instru­ment et de le laisser en place. Lors de la réorganisation du culte, en 1800, Mademoiselle de la Valette, dont le père avait été guillotiné, donna l'orgue à la paroisse.

A la suite d'un relevage, en 1820, un certain Benoît fut nommé organiste, qui devint ensuite organiste titulaire de la cathé­drale de Sens, avant de finir maître de Chapelle du roi Louis- Philippe aux Tuileries. Une « glace pour l'orgue » fut achetée en 1826, et un abonnement fut passé en 1828 pour un recueil de musique d'orgue. Un nouveau relevage fut effectué en 1840 par Jean-Baptiste Gavot, facteur à Bourbonne-les-Bains. Un certain Bernard était alors organiste titu­laire ; il était également chef de musique de la Garde Nationale.

En 1836, il avait estimé les répa­rations nécessaires à 8 000 fr.

Des travaux plus importants furent menés à bien en 1861 par Charles Didier, facteur originaire d'Etival, alors établi à Luxeuil (Haute-Saône). Signé le 31 mai 1861, le traité prévoyait la pose d'un soufflet neuf et le remplace­ment de deux jeux du grand- orgue par un Clairon et une Gambe. Deux jours auparavant, le conseil municipal avait voté 400 fr pour l'orgue, après que les réparations aient été estimées à 560 fr par l'organiste Bernard. Les travaux furent reçus le 8 octo­bre de la même année. Entre temps, M. Bernard était décédé le 29 juin et Jean Itard, professeur de musique à Neufchâteau, lui avait succédé le 21 juillet 1861. Des réparations, signalées comme nécessaires en avril 1864, furent effectuées en octobre 1866, pour 881,75 fr, mais le facteur n'est pas cité. La maison Jaquot- Jeanpierre & Cie, de Rambervil- lers, intervint à son tour en 1884, posant un appel d'anches et modifiant le tirage des jeux du positif.

 

La console de Didier et Schwenkedel.

 

Mais lorsque la reconstruction de l'orgue fut jugée nécessaire en 1891, la paroisse se tourna à nouveau vers la famille Didier, confiant les travaux à Henri Didier, fils de Charles. Ce choix fut évidemment dicté par l'orga­niste d'alors, l'abbé Simonet, qui était un redoutable agent com­mercial de Didier ! Reçus le 6 mai 1892 par Ernest Grosjean, orga­niste de la cathédrale de Verdun, les travaux coûtèrent 5 922,05 fr, dont 1 500 fr payés par un certain Charles Bérard et 1 208 fr payés par souscription. Dans son devis, Didier dit avoir relevé dans le sommier l'inscription suivante : « Silbermann fecit 1682. Donné aux Bénédictins de St Mansuy desservants, par le duc de Lorraine ». Mais on peut mettre en doute ce renseignement, où ni le facteur ni le donateur ne con­cordent. Car de quel Silbermann s'agirait-il ? André Silbermann, né en 1678, aurait été bien pré­coce ! C'est également Didier qui signale que les 3 jeux de pédale auraient été ajoutés au XVIIIe siè­cle, dans les plates-faces ajou­tées de part et d'autre du buffet ancien.

Henri Didier revint en 1900 pour ajouter un récit expressif de 7 jeux, actionné par une traction pneumatique d'un nouveau sys­tème breveté, et dont la boîte expressive nuisait beaucoup à l'aspect visuel de l'ensemble. Les nouveaux jeux furent harmonisés par Fernand Prince, ancien har­moniste de Cavaillé-Coll, et la réception des travaux fut assurée le 29 avril 1900 par Auguste Kling, organiste de Saint-Epvre de Nancy.

Un relevage fut effectué en 1929 par Joseph Voegtlé, et l'orgue fut réinauguré le 27 octo­bre 1929 par Marie-Thérèse Brandt, organiste titulaire.de Saint-Nicolas. Un nouveau rele­vage fut assuré en 1942 par Henri Pallaud, facteur de Bergues-sur- Sambre, alors établi à Nancy, qui entretint ensuite l'orgue jusqu'en 1951, avec notamment un nou­veau relevage assez coûteux en 1947, suite aux dommages subis lors d'un bombardement en 1940 et d'un combat aérien en 1944.

Mais ces travaux étaient insuffi­sants. Après force démarches, la municipalité obtint que l'orgue soit remis en état au titre des dommages de guerre. Ces travaux furent menés par le facteur strasbourgeois Curt Schwenkedel, de 1962 à 1964, pour la somme assez limitée de 47 234,70 fr. Ce ne fut pas une restauration au sens propre du terme, mais plutôt une transfor­mation selon l'esprit néo-baro­que, réutilisant les jeux de Treuillot mais aussi une partie de la tuyauterie du XIXe siècle, évi­demment transformée. En suppri­mant le récit pneumatique et en rétablissant des jeux de mixtures

 

La mécanique du positif.

 

et de mutations, Schwenkedel rendit cohérence à l'instrument. Le concert inaugural fut assuré le 11 octobre 1964 par Gaston Litaize, qui vit dans cet instrument « l'un, pour ne pas dire le plus réussi du déparfemenf des Vosges ». Même si aujourd'hui le concept de restauration a consi­dérablement évolué, cet orgue garde bien des qualités et demeure un témoin du talent de Schwenkedel.

BUFFET

On distingue aisément les deux campagnes de construction. Le positif et la partie centrale du grand-orgue, avec les trois tou­relles et les deux plates-faces, ^x.sont de Jean Treuillot — ou plutôt du sculpteur Christophe II Jac- quin. Le grand-orgue est sur­monté des armes du donateur Simon Sallet, avec un alérion entre deux croix de Lorraine, alors que le blason de la ville de Neufchâteau trône au-dessus du positif. Les claires-voies qui des­cendent très bas sont particulière­ment caractéristiques de Treuillot, destinées à économiser les sur­longueurs des tuyaux de façade, ce que l'on peut observer dans d'autres buffets de Treuillot, notamment au positif de dos de Notre-Dame de Beaune (Côte- d'Or). A l'origine, le grand buffet était muni de volets, comme l'at­testent encore 4 gonds aux extré­mités latérales des grandes tou­relles. Deux plates-faces ont été ajoutées pour les jeux de pédale, probablement au XVIIIe siècle, en réutilisant les écoinçons du XVIIe siècle et en élargissant le soubas­sement. On distingue encore les poignées des tiroirs de laye des sommiers de pédale, qui s'ou­vraient donc vers l'avant. Depuis 1964, l'espace situé derrière ces plates-faces latérales est quasi­ment vide, à l'exception de quel­ques tuyaux postés. Bien que construit après 1684, le positif semble bien être de la même main que le grand-orgue. La décoration sculptée en est d'ail­leurs plus fine, notamment les deux pots-à-feu.

Le meuble est en chêne, excepté les ornements — particu­lièrement soignés — qui sont en tilleul. Le tout a été peint en faux-bois en 1892, par Henri Maucotel, avec des dorures sur les ornements. Derrière les claires-voies sont tendues des pièces de tissu rouge, qui confè­rent au meuble une impression de polychromie. Au positif, le pla­fond, plus haut qu'à l'origine mais plus bas qu'après les tra­vaux Didier, et les panneaux arrière sont en contreplaqué, de 1963. Au grand-orgue, les pla­fonds sont anciens, mais les pan­neaux arrière n'existent plus, du moins pour la partie centrale, pour conférer plus de présence à la pédale. Les panneaux arrière du soubassement sont en agglo­méré.

Les tuyaux de façade sont tous de Didier (1891), en étain, avec écussons rapportés en plein-cin­tre pour les tuyaux centraux des tourelles et imprimés en ogive pour les autres. Les tuyaux des

 

La chambre des souffleurs, construite au- dessus du portail principal.

plates-faces de pédale, de trop grosse taille, sont actuellement postiches, mais ils parlaient en 1891 : ils sont marqués «F P» (Flûte de pédale) et comportent des entailles de timbre.

Inventaire des orgues des Vosges / Christian LUTZ​

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